Le poème du mois
Article mis en ligne le 15 septembre 2017
dernière modification le 11 septembre 2017

par Alain BOUDET

J’ai choisi pendant l’été de vous inviter dans mes carnets. Dans mon dernier chantier d’écriture. D’aller à la rencontre d’enfants d’ailleurs qui pour une grande part de leur vie, ne mènent pas une vie d’enfant.
Voici la dernière visite avant que le carnet ne se referme…

 Samia (Afghanistan)

Samia veut aller à l’école

Mais c’est trop loin
mais c’est trop cher
mais c’est une fille

Et ça et là
les filles ne vont pas à l’école

Et ça et là les gens
les gens
se rabougrissent
la vie s’en va à reculons
et rapetisse

Écrire compter
et puis sourire
pour que le cercle s’agrandisse
de ceux qui petit à petit
lèvent la tête et réussissent

C’est cela que voudrait Samia
et puis Karia, Imaan, Siri
et puis Maryam, Nimra, Zareen

Voilà pourquoi
de ci de là
les choses bougent
les cœurs frémissent
Les filles vont aller à l’école

Et c’est justice.

© Alain Boudet, inédit
tous droits réservés

Et pour la dernière fois, ce poème de Joëlle Brière, en fil rouge pour l’été…

Je vous écris encore tenue par les pages d’un livre.
Un livre qui fut écrit et qui s’écrit encore avec moi.
Un livre qui s’écrira demain pour quelqu’un d’autre.
Il en est ainsi de toute lecture. Elle va avec qui va avec elle. Plus encore elle devient ce qu’on la fait devenir.
L’auteur et le lecteur sont le pair et l’impair de ce consentement de mots en convois
sur les pages.
L’un n’existant que parce que l’autre est là. L’autre ne s’augmentant que parce que l’un osa.
Parfois, dans les entrelacs de ce commerce solaire ils se rencontrent. Ils entament alors une frêle rivière.
Elle prolonge leurs songes et leur sang.
Ils en labourent les tumultes. Ils les éclairent d’un lit d’herbes, d’un cantonnement de pierres.
Et puis ils se regardent dans les feuillages de la chair.
Et ils entament un nouveau livre.

Joëlle Brière
Lettres sous silence
© La Renarde Rouge, 2007