L’aube étincelle dans l’herbe des vigueurs
Souffle mûr mêlé du sang des hommes
Tu marchais réinventant le pas du sol comme une soif
Dans le vent neuf
Je te regarde tu courais
Geste habité du vœu de naître
Auprès des croix
Qui font parfois les pierres profondes
12 juillet 1994
Moment cendré de l’étendue
Chancelant
Et notre pauvreté nous vient d’un même exil
Dans le temps
Grandir a dissipé le seul voyage
Entre l’arbre et le seuil
Entre nos mains
Désormais c’est l’herbe qui nous dure
Sa cécité très douce à nos pas retranché
13 juillet 1994
Apreté nue des routes
Où le crime se promène
imprégné d’odeurs
De sang, de lait
Dont je sais la rumeur
Moi qui marche, soucieuse
Des peuples et des danses
Serais-je la ferveur
Insensée de leurs rythmes
Mais j’ignore si c’est l’aube ou l’or qui saigne
Sur le pré incertain des sables
13 juillet 1994
Béatrice Douvre
in Derniers poèmes, extrait de Journal de Belfort - éditions La Coopérative, 2019
En 1994, Béatrice Douvre décédait à l’âge de 27 ans, victime d’anorexie.